Au moment où elle avait franchit la porte de l’auberge, Alice ne s’était pas sentie rassurée. Oh non, elle n’avait pas peur ! Elle se méfiait, simplement. La peur ne faisait qu’embrouiller l’esprit, la méfiance le rendait rapide et aidait à anticiper le danger (mode Yoda : OFF). Avant même qu’elle ait pu s’approcher d’une table, tous les regards s’étaient tournés vers elle un bref instant. Dans un serrement de cœur, elle craignit d’être reconnue par un de ses vieux camarades de navigation. Mais bientôt, tous les hommes attablés se détournèrent pour revenir à leurs boissons, jeux ou négociations. Rassurée, la jeune femme se mit en quête, à coup d’yeux et d’oreilles, d’une phrase ou d’un visage interessant. Elle savait plus ou moins ce qu’elle cherchait. Un de ces vieux loups de mer, des seconds, menuisiers ou cuistos, qui connaissaient bien leur « maison », et sauraient la renseigner sur les postes qu’elle pouvait y trouver. Elle avait décidé, dès le départ, de ne pas se montrer trop exigente, bien qu’elle aie pu devenir capitaine si elle avait possédé un navire en état de flotter.
Alors qu’elle pensait avoir repéré son homme, un gars entre deux âges, le visage mangé par une barbe poivre et sel, qui semblait attendre quelqu’un dans un coin de la pièce, une voix grave l’interpela. « Le gringalet ». Au milieu de tous ces marins à muscles d’acier et cous de taureau, ça ne pouvait être qu’elle. Etrangement, elle ne s’en formalisa pas outre mesure. En effet, l’attitude et le physique qui accompagnaient cette voix étaient assez étonnants pour que Moins-un-Doigt en oublie sa susceptibilité. Meryl semblait être apparue comme par magie à côté de la brune, qui eut un mouvement de recul, et bouscula quelqu’un qui, apparemment, cherchait à s’paprocher d’elle le plus discrètement possible. Pourtant, là encore, Alice oublia sa méfiance. Assurément, celle qui venait de lui parler pouvait être considérée comme une belle femme. Une belle femme au courant de sa beauté, vu les habits qu’elle portait. Avec un pincement de cœur, la demoiselle songea qu’elle aussi aurait pu déambuler comme ça, et attirer le regard des hommes. Moins que Meryl, bien sûr, mais quand même, il fallait avouer que dans le genre dure-à-cuir, elle n’était pas laide… Elle adopta une attitude admirative, comme elle savait que les gars le faisaient devant une pareille plante. Cependant, elle ne pouvait s’empêcher de la trouver étrange. Comme si quelque chose n’était pas naturel dans son apparence. Mais ce n’était qu’un vague pressentiment, l’instinct féminin peut-être ? D’ailleurs, cela faisait longtemps que Nath avait mis ses intuitions au placard.
[glow]« Je peux faire quelque chose pour vous, madame ? »[/glow]
Ton poli, regard curieux. Le parfait gentleman, sauf pour ce qui était de la voix rocailleuse, et du léger accent, que les connaisseurs pouvaient reconnaître comme issu du breton de brest. Mais on trouvait tellement de couleurs et de parlers différents à Ametrista qu’on n’y prêtait pas forcément attention…